Ils transportent du gaz toxique sans le savoir (15/10/2002) Des salariés de Draëger Industrie viennent de porter plainte auprès du procureur d'Aix pour 'mise en danger de la vie d'autrui'. Ils manipulent et transportent des dizaines de gaz, plus dangereux les uns que les autres. Souvent sans le savoir. Nos incroyables révélations... (12h27) Hier matin, les techniciens du service après vente de la filiale française de Draëger Industrie, basée à Strasbourg et comptant cinq agences en France, ont porté plainte contre leur entreprise pour ne les avoir pas suffisamment informés sur la nature des gaz qu'ils manipulent et qu'ils transportent quotidiennement pour mener à bien leur mission. Nous nous sommes procuré une copie du projet de plainte, transmis hier soir, au Parquet. Leur mission ? Tarer les détecteurs d'incendie et de gaz dans les principaux sites Seveso 1 et 2 et les principales centrales nucléaires. Pour tester ces détecteurs, les employés de Draëger utilisent des dizaines de gaz extrêmement dangereux. On pourrait imaginer alors que les salariés de Draëger possèdent dans leurs agences des systèmes de détection drastiques. Il n'en est rien ! En cas d'incendie, les conséquences seraient dramatiques Pas de détecteurs, pas d'autorisation pour stocker des centaines de bouteilles dans des pièces non prévues à cet effet. Pire, les techniciens SAV transportent jusqu'à 15 bouteilles de tri chlorure de sodium, de phosphine ou encore d'hydrogène de sulfure pour accomplir leurs interventions dans les sites les plus sensibles, dans des voitures ou des camionnettes non équipées et non autorisées pour ce genre de transport. En cas d'accident de la route, si une de ces bouteilles venait à être percée, les conséquences seraient énormes. Dans leur entrepôt, les agents de maintenance de Draëger doivent, en outre, à les croire, effectuer eux-mêmes et sans contrôle les purges de bouteilles (tous les 12 mois pour les tri chlorures et tous les six mois pour la phosphine). Les salariés affirment aujourd'hui qu'aucune consigne particulière ne leur avait été donnée par leur entreprise pour ces opérations à hauts risques. Des transporteurs livrent des dizaines de litres de gaz extrêmement dangereux sans le savoir ! Aux Milles, par exemple, près d'Aix-en-Provence, l'unité Draëger est voisine d’une usine d'Air Liquide. En cas d'incendie, les pompiers ne pourraient pas intervenir, ne connaissant pas obligatoirement l'ensemble des gaz entreposés. On croit rêver ! Enfin, les employés de Draëger affirment que leur entreprise utilise les services de transporteurs pour le "colisage" de ces gaz. Ainsi, des transporteurs, bien malgré eux, convoieraient des dizaines de litres de ces gaz tordus sous pression à 34 bars. A cette pression, ils peuvent ainsi résister à un choc, mais le chauffeur routier n'aura aucun moyen de vérifier qu'une bouteille se perce en route ! Des terroristes pourraient facilement s'emparer de ces gaz Hier midi, les salariés ont fait constater par huissier les conditions incroyables de manipulation et de transport de ces bouteilles. Les services de police, prévenus, ne se sont pas déplacés, ni le préfet de Région. Quant à la Drire, son directeur à Aix en Provence affirmait hier n'avoir aucun inspecteur pour constater les entorses à la réglementation sur le stockage et le transport de matières dangereuses. Enfin, la DDTE ne s'est pas non plus déplacée. "On vit vraiment dans une république bananière", s'indigne un salarié. "On attend peut-être un second AZF pour réagir", conclut-il, amer. Par ces temps de risques importants en matière de terrorisme, certains expliquent qu'il est très facile de braquer une camionnette bourrée de gaz ou encore de pénétrer dans les espaces de stockage de Draëger. Rédacteur : Omri Ezrati